Billet du 2 juin 2023 : Quand on lit entre les lignes

Savoir lire entre les lignes est une faculté qui s’acquiert. Quand le ministre de l’Éducation ose affirmer que de donner une classe à quelqu’un qui ne possède qu’un diplôme d’études secondaires est préférable à laisser cette classe sans enseignant1, je commence à comprendre le fond de sa pensée. La vie publique de Bernard Drainville étant ponctuée d’allers-retours entre les médias et l’Assemblée nationale, il a pourtant maintes fois dénoncé la piètre qualité des résultats en français chez les élèves du secondaire. Il ouvre maintenant la porte du statut d’enseignant aux personnes qui en sont issues, sans avoir étudié au-delà.

Dans mon billet de la semaine dernière2, j’établissais un parallèle entre la pénurie de juges à la Cour supérieure du Québec et celle dans le domaine de l’enseignement, en illustrant les différences notoires dans les manières de les gérer. Cette semaine, c’est le chroniqueur Richard Martineau qui a tenté un exercice similaire3, parodiant l’arrivée fraîche de 15 nouveaux chirurgiens dans un hôpital, après que ceux-ci aient suivi une formation accélérée de 30 crédits. La comparaison suggérée par Martineau démontre rapidement le ridicule de la situation.

Enseigner, ce n’est pas uniquement transmettre et évaluer des notions de français, de mathématiques et de quelques autres matières. C’est aussi créer des liens d’attachement avec chaque élève. C’est déceler les difficultés, académiques ou autres, de chacun d’eux. C’est collaborer avec les parents. C’est mettre en place des structures et des interventions visant la réussite scolaire et le développement des habiletés sociales. C’est participer à plusieurs comités pour stimuler l’intérêt d’un groupe en particulier ou de l’école entière. C’est contacter différents organismes chaque fois que les besoins d’un enfant le requièrent. C’est aussi entretenir les suivis qui en découlent. C’est de nombreux rapports écrits demandés par des professionnels de la santé et autres spécialistes, remplis la plupart du temps sur notre temps personnel. Et toujours gratuitement. C’est gérer les émotions des enfants et, de plus en plus, composer avec celles de leurs parents. C’est planifier chaque semaine plusieurs activités académiques en les développant à travers diverses approches pédagogiques de manière à rejoindre tous les élèves dans leurs différents styles d’apprentissage. Et j’en passe.

Après mon parallèle de la semaine dernière et la lecture de la rubrique de Richard Martineau, je me suis demandé ce qu’il adviendrait si nous procédions à l’inverse et que nous insistions pour que, comme c’est le cas en justice et en santé, le domaine de l’éducation ne fasse appel qu’à du personnel légalement qualifié. Probablement que les délais pour obtenir de l’instruction s’avéreraient longs. On devrait fermer des classes faute d’enseignants. Pour les mêmes raisons, des écoles pourraient devoir réduire leurs heures ou fermer temporairement. Dans tous ces cas, nombre d’enfants devraient demeurer à la maison, faute de pouvoir obtenir une instruction de qualité, donnée par une personne qualifiée.

Et c’est là qu’il faut lire entre les lignes. On l’a constaté durant la pandémie, notre société n’est pas équipée pour garder ses enfants à la maison. On a beau prétendre que l’école est un milieu d’apprentissage, c’est son côté service de garde qu’on recherche d’abord et avant tout. Il n’y a plus d’enseignants ? Arrangez-vous pour trouver quelqu’un qui va au moins garder mon enfant, aux frais de l’État.

Ça, le ministre Drainville l’a compris. Et l’évidence est telle qu’il peut impunément tolérer l’inacceptable, pour reprendre les mots de Marwah Rizqy. La lecture des sous-entendus n’aura jamais paru aussi limpide.

1 Plante, Caroline. Un diplôme d’études secondaires, c’est mieux que rien, plaide Bernard Drainville. La Presse canadienne. Le 1er juin 2023.

2 Billet du 26 mai 2023 : Un positionnement historique récent.

3 Martineau, Richard. N’importe qui peut être prof, voyons! Le Journal de Montréal. Le 1er juin 2023.


On arrive à un des quelques moments de l’année où il faut abréger l’écriture du blogue pour investir ce précieux temps dans la correction des évaluations et la compilation des bulletins. Même si on voulait qu’il en soit autrement, les paupières s’affairent à nous rappeler que le corps requiert un minimum de repos. Pas question de couper sur les heures de sommeil, donc. On limite le nombre de blocs pour cette semaine.


Dans le cours de musique

Je prends quand même le temps de vous proposer une #musiquebleue. Avec la sortie récente du dernier Half Moon Run, le choix s’avérait facile. L’album s’intitule Salt. Voici la pièce You Can Let Go.

Half Moon Run – You Can Let Go – Salt – #musiquebleue

Billet du 15 avril 2022 : Repos pascal

La longue fin de semaine de Pâques commence aujourd’hui. Pour les enfants, Pâques est la fête des œufs en chocolat. Pour les chrétiens, elle est celle qui célèbre la passion et la résurrection du Christ. Si on plonge dans l’histoire, on y trouve quelques autres significations.

La Pâque juive, d’abord, réfère à la sortie d’Égypte du peuple hébreu qui, guidé par Moïse, se libérait ainsi de l’esclavage. Le mot vient du grec Paskha (ou pasah, en hébreu), qui signifie passage. C’est durant ces festivités commémoratives que Jésus aurait vécu la dernière Cène, son arrestation et sa mise à mort.

Toujours dans l’Antiquité, Pâques constituait l’occasion de remercier les divinités pour les différentes renaissances apportées par l’arrivée du printemps. On leur offrait ainsi les premières moissons de la saison. La déesse Éostre est celle qui aurait laissé son nom à la fête de Pâques anglo-saxonne. D’Éostre à Easter, le dérivé est court.

À noter que dans la langue française, la Pâque juive s’écrit sans le s de la fin. Pour les significations chrétienne et païenne, Pâques prend la marque du pluriel.

Peu importe ce que vous célébrez à partir d’aujourd’hui, je vous souhaite un long week-end heureux et reposant.


Dans le cours de musique

Les sorties musicales de l’année 1969 ont plus que marqué l’industrie, elles l’ont révolutionnée. Cette année-là a vu naître, pour ne citer que quelques exemples, les albums Yellow Submarine et Abbey Road, des Beatles ; Québec Love, de Robert Charlebois ; Space Oddity, de David Bowie ; Led Zeppelin II, de Led Zeppelin ; Désormais, de Charles Aznavour ; Les Champs-Élysées, de Joe Dassin ; de même que Il était une fois dans l’Ouest, d’Ennio Morricone. On peut également ajouter le classique Je t’aime… moi non plus, de Serge Gainsbourg et Jane Birkin.

Intrigué par le « son » 1969 qui a donné tant de succès, le producteur montréalais Connor Seidel a projeté durant quelques années une compilation d’œuvres originales reprenant le style, les accords et l’innocence de l’époque. Pour ce faire, il s’est entouré d’une pléiade d’artistes d’ici, dont Ariane Moffatt, Elliot Maginot, Half Moon Run et Elisapie. L’album de 13 chansons s’intitule 1969. Tirée de cette trame, je vous propose la pièce Tu danses, condessa, de Seidel et Safia Nolin.

En passant, l’album complet vaut la peine d’être écouté.

Tu danses, condessa – 1969 Collective, Safia Nolin – 1969 – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

Le quotidien La Presse rapportait jeudi que les statistiques de l’année 2020, première année de la pandémie, démontrent une baisse de 66 millions de tonnes dans les émissions de gaz à effet de serre (GES), au Canada. En pourcentage, ceci représente une diminution de 9 %.

On peut supposer que la reprise des activités économiques, qui verra renaître le transport routier et aérien, viendra annuler une partie de cette diminution. Toutefois, la baisse des émissions de GES déjà observée dans les secteurs énergétiques et pétrogaziers devrait se poursuivre de manière constante, au cours des prochaines années.


Billet du 11 septembre 2020

Dans le cours de français

Le 11 août dernier, l’Office québécois de la langue française publiait, de concert avec l’Institut de la statistique du Québec, un rapport intitulé Enquête sur les exigences linguistiques auprès des entreprises, des municipalités et des arrondissements de Montréal. On y trouve plusieurs constats sur la langue parlée au travail, mais une statistique est venue confirmer une situation que je dénonce depuis plus de 25 ans. Selon ce rapport, 41% des entreprises et 20% des municipalités et arrondissements situés sur l’île de Montréal exigeraient une connaissance de l’anglais pour les communications à l’interne. Ceci contraste avec la moyenne québécoise où les proportions sont respectivement de 21% et 7,5%.

J’accepte facilement le fait qu’on veuille embaucher du personnel bilingue pour répondre dans les deux langues officielles à des clients ou à des fournisseurs. Il s’agit alors de communications externes et cela se justifie très bien.

Alors que le débat sur la langue d’affichage faisait rage au Québec, dans les années 1990, je savais que de grandes entreprises d’ici, ayant pourtant obtenu leur certificat de francisation, n’utilisaient que la langue de Shakespeare pour leurs communications internes, tant verbales qu’écrites. Les médias et la société en général n’en avaient que pour l’affichage, alors qu’un problème selon moi plus important leur passait sous le nez.

Force est d’admettre que cette situation a persisté et a évolué dans le mauvais sens. La bonne nouvelle, c’est qu’un organisme y a enfin prêté attention. Le même organisme qui octroie les certificats de francisation, d’ailleurs. Reste à savoir si des actions seront posées pour y remédier.


Dans le cours d’éducation physique

Je suis un grand partisan de baseball depuis plus de 40 ans. J’ai reçu la piqûre un samedi après-midi d’avril, en 1977, alors que mon grand-père et mon père nous avaient emmenés au Stade Olympique, mon frère et moi, pour notre premier match des Expos. Je m’en souviens très bien, les locaux avaient vaincu les Phillies de Philadelphie.

Ma passion ne s’est ensuite jamais démentie. J’ai joué, j’ai entraîné, j’ai passé nombre d’étés sur les terrains de baseball, pour moi et pour mon fils. Je suis un amateur de baseball beaucoup plus que je n’étais un partisan des Expos. Depuis plusieurs années, je suis abonné à MLB.tv et en saison, mon téléviseur est branché quotidiennement sur 2, 3 ou 4 matchs.

Depuis l’an dernier, je trouve les joutes ennuyantes. Pour être franc, je trouve qu’elles ressemblent au concours de coups de circuit qui précède le match des étoiles, chaque année. Plus grand chose ne se passe sur les buts, les défensives sont de plus en plus erratiques et les frappeurs ne savent plus contrer les défensives spéciales que l’adversaire déploie constamment contre eux. La longue balle est devenue la norme et n’impressionne plus.

Pour assister à du baseball pur et stratégique, il faut se tourner vers les calibres inférieurs, comme la Ligue Frontier, où évoluent les Capitales de Québec et les Aigles de Trois-Rivières, ou encore la Ligue de baseball junior élite du Québec. La première a suspendu ses activités pour l’année en cours, en raison de la pandémie.

Il faut surtout continuer d’enseigner aux jeunes que le baseball est un sport magnifique, où l’on gagne avec des coups sûrs, de la vitesse sur les buts, des lanceurs possédant un bon répertoire de lancers et une défensive qui sait réaliser tous les jeux. Un sport, comme toute chose, peut et doit évoluer. Mais il fait fausse route quand il en perd ses repères.


Et je cite :

« J’ai rêvé que Lucie Laurier était première ministre du Québec, que Maxime Bernier était premier ministre du Canada et que Jeff Fillion était en dépression parce qu’il n’avait plus rien contre quoi s’opposer. »

Daniel Thibault, auteur, le 8 septembre 2020.

Jouons avec les mots

La dernière fois, je vous demandais quelle était la particularité du mot ressasser. Au-delà du fait qu’il s’agisse d’un verbe évoquant un retour ou une répétition à l’intérieur de soi, ressasser est aussi le plus long palindrome de la langue française, c’est-à-dire le mot le plus long pouvant se lire aussi bien à l’envers qu’à l’endroit.

Il faut toutefois noter qu’un palindrome peut aussi se trouver dans une phrase ou même dans un texte. La phrase Élu par cette crapule est un palindrome connu. Mais la palme du plus long palindrome textuel revient au génie de Georges Perec, acrobate de la langue française, qui a su pondre un texte de 1247 mots, rien de moins, pouvant se lire également à rebours.

Dans la même veine, je vous demande cette semaine de vous pencher sur le mot institutionnalisation. Selon vous, qu’est-ce que ce mot possède de particulier ?

Réponse dans mon billet de la semaine prochaine.


Dans le cours de musique

Virage aussi intéressant qu’inusité pour Dylan Phillips, le batteur du groupe rock montréalais Half Moon Run. Il n’est pas rare de voir un membre d’un groupe entreprendre une carrière solo en parallèle, mais passer de la batterie au piano, passer du rock au néo-classique, ça sort de l’ordinaire. Phillips a lancé Undercurrents, un court album de cinq pièces, le 21 août dernier. En voici la pièce titre.

#musiquebleue


La bonne nouvelle de cette semaine

Acquisition de taille pour la recherche montréalaise sur l’intelligence artificielle, avec l’arrivée d’Irina Rish à la direction d’une chaire affiliée à l’Université de Montréal. Cette sommité internationale a ainsi quitté les bureaux newyorkais d’IBM, où elle travaillait depuis 20 ans, afin de poursuivre au Québec ses travaux visant à développer des relations entre l’intelligence artificielle et le cerveau humain. Ceci confirme la place enviable de la métropole québécoise sur l’échiquier international en matière d’IA. Madame Rish disposera d’un budget de 34 millions $.