Journal de vacances du 1er août 2025 : Singulier, comme Foglia

J’ai passé de nombreuses années à pratiquer le journalisme. Du journalisme étudiant, d’abord, avant de prendre la responsabilité des publications officielles de plusieurs organisations dans lesquelles j’ai milité. J’ai été propriétaire d’un site d’informations durant quelques années. J’ai aussi fait de la pige pour des journaux hebdomadaires et pour des revues. Je suis par la suite devenu blogueur. Tout ceci m’a amené à collaborer avec de nombreuses personnes. Parmi celles-ci, plusieurs cherchaient à calquer le style de Pierre Foglia.

Il va sans dire que personne ne s’en rapprochait. Vouloir calquer Foglia, c’est comme vouloir calquer Coluche, Yvon Deschamps ou Virginia Woolf. Ils sont tous uniques dans leurs créneaux. Pour s’inscrire dans leur catégorie ou atteindre leur niveau, il faut à la fois présenter son message sous un angle différent des autres et agencer parfaitement les mots pour le communiquer au lectorat ou à l’auditoire. Il demeure très difficile de le faire sans s’y casser les dents ou la pointe de sa plume. Stéphane Laporte et Boucar Diouf y parviennent plutôt bien.

Depuis que j’écris, je n’ai pas cherché à imiter Foglia. Pas par prétention, mais par lucidité. J’aime trop écrire pour le copier. Ce que j’ai plutôt tenté, au fil du temps, c’est de faire entendre ma propre voix, même si elle tremblait un peu. De poser mes mots comme on pose un regard : avec attention, avec justesse, parfois avec tendresse, parfois avec colère. Écrire, c’est un peu risquer le faux pas. Mais c’est aussi, quand on le fait sincèrement, tracer un sentier que d’autres pourront suivre, ou éviter, mais qu’on aura eu le courage d’ouvrir.

Il s’est éteint cette semaine en emportant son œuvre avec lui. Il nous laisse cependant une leçon à retenir : écrire, c’est oser être singulier.


Regard sur le monde

Avec sa décision récente, le Canada emboîtera le pas à la France, à la Grande-Bretagne, à l’Espagne, à l’Irlande et à plusieurs autres pays en reconnaissant officiellement l’existence d’un État palestinien. Ce geste diplomatique, hautement symbolique, s’inscrit dans une longue histoire de tensions, de guerres et de négociations manquées entre Israël et le peuple palestinien. Le conflit israélo-palestinien, vieux de plus de 75 ans, prend racine à la fin du mandat britannique sur la Palestine, un territoire administré par le Royaume-Uni de 1920 à 1948 sous l’égide de la Société des Nations. Lorsque ce mandat a pris fin, l’ONU a proposé un plan de partage entre un État juif et un État arabe, mais celui-ci a été rejeté par les pays arabes, menant à la création unilatérale de l’État d’Israël et à une série de conflits armés. Depuis, les Palestiniens revendiquent leur propre État, notamment en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, territoires qu’ils considèrent comme les leurs.

Ce qui a mené à cette reconnaissance récente repose sur plusieurs facteurs. D’une part, l’impasse persistante dans les négociations de paix a convaincu de nombreux pays qu’un changement d’approche devenait inévitable. D’autre part, les événements tragiques de l’automne 2023 — notamment l’attaque sanglante du Hamas contre des civils israéliens et la riposte militaire israélienne à Gaza — ont ravivé l’attention internationale sur le conflit. Plusieurs gouvernements ont conclu que la reconnaissance d’un État palestinien pourrait contribuer à rééquilibrer une dynamique diplomatique jusque-là asymétrique. Cette reconnaissance, faut-il le souligner, ne vise pas à cautionner le terrorisme, mais bien à soutenir la vision d’un avenir plus viable, où deux peuples pourraient enfin coexister dans des États distincts, chacun doté de droits, de frontières et d’un avenir.

Les avis demeurent partagés. Les partisans de la reconnaissance estiment qu’il s’agit d’un pas en avant pour la paix et la justice, soulignant que des millions de Palestiniens vivent depuis des décennies sans État, sans citoyenneté véritable et souvent sous occupation. Ils espèrent que ce geste contribuera à rouvrir le dialogue. Les opposants, pour leur part, craignent qu’une telle reconnaissance ne récompense pas seulement l’inaction politique des dirigeants palestiniens, mais qu’elle envoie aussi un message ambigu alors que le Hamas demeure actif et que la sécurité d’Israël n’est pas assurée. Pour eux, la reconnaissance doit venir à la fin d’un processus de paix, et non au début. Pour sortir d’une crise, il faut parfois tracer la voie vers ce à quoi certains donnent encore le nom d’utopie, mais que d’autres perçoivent avec prudence, mais avec espoir, comme un point d’équilibre.


Dans mes écouteurs

Argile est un artiste québécois émergent, repéré récemment comme un souffle nouveau de la scène indie-pop francophone. Son mini-album éponyme, Argile, officiellement lancé le 18 juillet dernier, comprend cinq titres soigneusement ordonnancés. L’artiste se distingue par sa voix douce et posée, ainsi que par son sens du détail en matière d’arrangement sonore.

Dans la pièce La recette, deuxième piste de l’album, la narration poétique se développe à partir de gestes quotidiens transformés en métaphores lumineuses. L’instrumentation y mêle guitares aériennes, nappes synthétiques délicates et percussions organiques, renforçant une tension douce entre fragilité et résilience. Tout au long de cette chanson, Argile tisse une recette intérieure, formulée avec des paroles posées, qui relance l’idée que nos routines peuvent devenir des rites sacrés.

La recette – Argile – Argile – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

Il s’est tenu cette semaine, au Palais des congrès de Montréal, un événement d’envergure mondiale qui donne espoir : le Congrès mondial sur les ITSS et le VIH. Sous le thème « La santé sexuelle pour tous », cette grande rencontre a rassemblé plus de 1 500 expertes et experts de partout sur la planète, venus échanger, réfléchir et proposer des solutions concrètes pour améliorer la prévention, le dépistage et les soins liés aux infections transmissibles sexuellement. Montréal, déjà reconnue pour son engagement en santé publique, a ainsi renforcé son rôle de chef de file en accueillant ce rendez-vous porteur de changement.

Parmi les innovations prometteuses présentées : des tests rapides à domicile, de nouvelles stratégies de prévention comme la PrEP (un traitement préventif qui protège efficacement contre le VIH) et la DoxyPEP (un antibiotique pris peu après un rapport sexuel à risque pour prévenir certaines ITSS, comme la chlamydia, la syphilis et la gonorrhée), ainsi qu’un appel clair à briser les tabous qui freinent encore trop souvent l’accès à l’information et aux soins. Dans un contexte mondial où les reculs sont possibles si l’on baisse la garde, ce congrès nous rappelle qu’il est possible de progresser à condition de miser sur la science, la solidarité et l’éducation. Une semaine lumineuse, donc, où la santé sexuelle a eu droit à toute la visibilité qu’elle mérite.


Billet du 1er janvier 2021 : Journal de vacances des Fêtes (2 de 2)

Au revoir 2020. Très sincèrement, je te remercie pour ce que tu as su nous apporter. Malgré tout ce que l’on dit sur toi, nous nous souviendrons toujours de toi. Comme on se souvient de 1929, de 1945, de 1968, de 1970 ou de 2001. Des années marquantes, où tout le monde a dû sortir de sa zone de confort, mais où tout le monde a appris à se serrer les coudes, voire à s’entraider. Même si tu entends qu’on voudrait t’oublier, rassure-toi : dans 20 ans, dans 50 ans, dans 100 ans, les cours d’histoire transmettront toujours les leçons que tu nous as inculquées.

Ma gratitude serait peut-être différente si je n’avais pas retenu la morale de cette magnifique histoire, lue il y a 25 ans, celle de L’Alchimiste, écrite par Paulo Coelho. La quête de la beauté et du bonheur peut nous mener loin et remplir notre bagage d’une multitude de richesses quelconques, mais qui n’ont rien à voir avec l’objet de notre quête. Ce qui fait qu’on en revient souvent bredouille. Pourtant, la beauté et le bonheur se trouvent souvent enfouis quelque part autour de nous, sous notre nez. C’est cette recherche à proximité que tu nous as donné l’occasion de faire, 2020. Et dans mon cas, plusieurs belles découvertes liées à ma quête sont venues avec.

Tu as aussi rétabli un certain équilibre entre les classes sociales. Quand on est confiné chez soi, certains bien nantis deviennent démunis, et vice-versa. Tu t’es amusée avec la puissance, la faisant changer de voie et la faisant changer de voix. Aurais-je pu penser, il y a un an à peine, qu’on aurait porté aux nues les préposés aux bénéficiaires et les infirmières encore plus que les médecins ? Au point où ces derniers se feraient carrément demander par les autorités gouvernementales de faire le travail des deux autres ? Que des policiers se retrouveraient en prison pour des gestes graves à connotation raciste ? Qu’un élu serait exclu du caucus de son parti pour avoir pris un verre avec des amis ? Qu’un tribunal populaire puisse te faire perdre ta liberté même si un tribunal judiciaire t’a épargné la prison ? Que des personnalités politiques devraient s’excuser, ou à tout le moins se justifier, d’avoir voyagé vers le Sud ?

Bien sûr, tu nous as physiquement isolés. Mais le grand Yvon Deschamps n’a-t-il pas déjà démontré que C’est tout seul qu’on est l’plus nombreux ? Jamais si peu de gens n’ont franchi la porte de ma demeure que durant ton règne, 2020. Mais grâce à Zoom, Teams et Google Meet, jamais autant de monde n’y est également entré. En 25 ans dans l’enseignement, jamais un de mes élèves n’avait vu les murs de ma maison. Cette année, tous mes élèves les ont vus. À distance, j’ai pu voir, parler et trinquer avec des amis et des collègues. J’ai même assisté à un mariage et à la noce qui s’en est suivi, à partir de ma salle à manger. Sans compter que mes enfants, qui se confinaient eux-mêmes depuis des lustres, ont voulu cesser de le faire à partir du moment où ils y ont été contraints. À défaut de pouvoir sortir dans les lieux publics, ils ont redécouvert les pièces communes de la maison, au plus grand bonheur de leur mère et du mien.

Je n’ai jamais été heureux ou triste de voir partir une année. Tu ne fais pas exception, chère 2020. Ton mandat de 366 jours s’est terminé il y a quelques heures, je te salue et j’accueille avec joie ta successeure, comme je t’avais accueillie il y a un an, comme je l’avais fait aussi pour toutes tes prédécesseures. Comme certains entraîneurs sportifs, tu as souvent été dure, mais tu as su faire ressortir le meilleur de tes joueurs. Encore une fois, au revoir et merci.


La bonne orthographe

Doit-on écrire jour de l’an avec des majuscules ? Si oui, où doit-on les mettre ? À jour ? À an ? Aux deux ?

D’abord, la règle générale précise qu’on doit mettre une lettre majuscule au début du nom spécifique. Jour et an sont tous les deux des noms. Lequel est plus spécifique que l’autre ? Il faut y aller avec an, qui précise ce qu’on célèbre. On devrait donc écrire jour de l’An, et c’est l’orthographe que j’emploie personnellement.

Toutefois, la langue française accepte également les combinaisons Jour de l’an, Jour de l’An et même jour de l’an, avec des minuscules partout.

Qu’en est-il alors de NOUVEL AN et de PREMIER DE L’AN ? Dans le premier cas, il faut écrire Nouvel An, avec des majuscules aux deux mots, car an est le nom spécifique et nouvel est un adjectif qui le précède. On écrit donc le Nouvel An, mais on écrirait l’An nouveau. Quant au second cas, il faut écrire Premier de l’an, étant donné que premier est le nom spécifique et que de l’an lui sert de complément.

Compliquée, cette règle ? Un peu, mais on finit par bien la retenir !


Droit dans les yeux

Le décès de Derek Aucoin, annoncé dimanche dernier, m’a beaucoup attristé. Il a été pour moi ce genre de personne que la vie met sur notre chemin à différentes époques. Il est entré à l’âge de 12 ans au Collège Saint-Sacrement, où j’étudiais depuis quelques années. Le Collège offrait un camp d’automne, qu’on appelait les classes rouges, à ses élèves de première et de cinquième secondaires. J’ai fait partie de l’équipe de moniteurs qui animaient les classes rouges de la cohorte de Derek, à son entrée en secondaire 1.

Deux choses m’avaient frappé chez lui. D’abord, son extrême gentillesse. En deux cohortes d’animation, il est le seul élève à être venu me remercier à la fin du camp. C’est là un trait de caractère qu’il a conservé tout au long de sa vie. On n’a d’ailleurs pas manqué de souligner cette gratitude qui le caractérisait, au cours des dernières années. Ensuite, il se distinguait déjà physiquement des autres par sa grande taille. À 12 ans, il faisait 1,78 m, ce qui m’a permis de garder la tête bien droite pour le regarder dans les yeux lorsqu’il est venu me serrer la main.

Impliqué également dans le baseball, comme joueur et comme officiel, je l’ai revu sur un terrain quelques années plus tard. Il était le lanceur partant de l’équipe midget de Boisbriand, lors d’un match durant lequel j’officiais derrière le marbre. Il m’a fallu des années avant de revoir une balle rapide avec autant de vélocité dans le baseball amateur.

Je fais partie des chanceux qui ont pu le voir dans l’uniforme des Expos, en mai 1996, lors d’un match contre les Dodgers de Los Angeles, au Stade Olympique de Montréal. Son séjour dans le baseball majeur a duré moins d’une semaine. Je l’ai finalement croisé à plusieurs occasions au cours des 15 dernières années, comme journaliste et comme père d’un jeune joueur de baseball, alors qu’il redonnait aux plus jeunes ce que la vie lui avait donné.

Il a d’ailleurs su marquer mon fils qui, à l’âge de 9 ans, avait participé à son camp de baseball. Le géant de plus de 2 m lui avait tendu la main et mon fils, plutôt intimidé, avait présenté la sienne d’une manière assez fuyante. Derek avait insisté pour une reprise en lui disant : « Tu dois donner une poignée de main franche, en serrant juste assez et en me regardant dans les yeux ». Paroles qu’il lui avait rappelées à la fin du camp, en l’appelant par son prénom.

Derek Aucoin enseignant aux jeunes, en juillet 2012, là où tout a commencé pour lui, au parc qui porte son nom, à Boisbriand.

Franchise, dévouement et gratitude. C’est ce que je retiendrai toujours de Derek Aucoin.


Lecture de vacances

Ce n’est pas un livre que je suggère, cette semaine, mais une entrevue réalisée avec l’anthropologue Serge Bouchard, diffusée sur radio-canada.ca. Monsieur Bouchard apporte un éclairage nouveau ou une prise de vue sous un autre angle à plusieurs dossiers d’actualité. Pour lui, la pandémie actuelle est une façon pour la nature de reprendre ses droits. Sans la nommer, il en fait une analogie avec la théorie de la sélection naturelle, de Darwin. Il nage aussi à contre-courant en affirmant qu’on vit du racisme au Québec, mais aucun racisme systémique.

Qu’on soit d’accord ou non, ses arguments portent à réflexion. Personnellement, ce texte m’est demeuré en tête durant de longues heures, après sa lecture. Il s’intitule La pandémie, une remarquable leçon d’humilité, il est rendu par Danielle Beaudoin, et il peut être consulté en suivant ce lien.


Dans mes écouteurs

En ce jour du Premier de l’an 2020, je vous propose la pièce Entrez dans la danse, de Raffy.

Raffy est à la fois le nom du groupe qui nous a donné cette pièce et le pseudonyme de sa leader, Carolyne Leblanc. Le groupe a animé nombre de belles soirées au 2 Pierrots du Vieux-Montréal, au cours des dernières années. La chanson se trouve sur l’album Joyeux Noël et Bonne Année, qui regroupe des reprises et des compositions originales de Raffy, mais aussi des prestations de Sébastien Gravel et de Denis Miron, deux complices du groupe.

Entrez dans la danse est une chanson sortie il y a un an, qui mélange à la fois le rock et le bon vieux set carré des veillées du jour de l’An.

#musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

Comme j’expliquais plus haut, la pandémie nous a offert de belles opportunités. Un article publié dimanche dernier dans le quotidien La Presse nous en relatait une très intéressante. Un biologiste de l’Estrie, qui étudie la truffe depuis de nombreuses années, s’est lancé dans sa culture. Quatre truffières ont vu le jour au Québec, en 2020, et au moins cinq autres arriveront en 2021. Trois variétés ont jusqu’à maintenant été plantées.

Le but est de permettre au terroir québécois de produire ses propres champignons pour la cuisine et d’en diminuer l’importation. La passion de Jérôme Quirion, 36 ans, n’a d’égale que sa détermination. Il a de plus choisi un excellent moment pour saisir l’occasion, les changements climatiques causant une diminution des conditions favorables à la culture de la truffe, en Europe, alors que le Québec possède une terre et un climat qui y sont très propices.


À vous qui chaque semaine ou occasionnellement lisez mes billets, je souhaite une excellente année 2021.

Soyons toujours reconnaissants…

Reconnaissants pour ce que nous possédons. Il s’agit de précieux cadeaux de la vie.

Reconnaissants aussi pour ce que nous devons laisser aller et pour tout ce temps où nous en avons bénéficié.

Reconnaissants, j’insiste là-dessus, pour toutes les épreuves que nous devons surmonter. Elles nous apportent force, sagesse et expérience.

Finalement, je nous souhaite, à vous, à moi, à celles et ceux qui nous entourent, la santé physique et mentale qui nous permettra de traverser la nouvelle année ensemble et de toujours bien exprimer cette reconnaissance.

MERCI ! SANTÉ !


Image en titre du billet : Shutterstock