Billet du 29 septembre 2023 : «Arrête ton charre», me direz-vous peut-être !

J’ai toujours prétendu que les cohortes d’élèves pouvaient se comparer à un vin. D’une année à l’autre, un même cépage peut produire une piquette ou un grand cru, avec tout l’éventail se trouvant entre ces deux extrêmes. Parfois, il faut le consommer tout de suite, sa jeunesse lui conférant un goût dont le potentiel se manifeste rapidement. À d’autres moments, il faut au contraire le laisser mûrir pour en soutirer un maximum de satisfaction.

Il y a maintenant un mois que j’ai entrepris ma 28e année d’enseignement. Il m’en restera encore quelques autres, mais la retraite frappera bientôt à ma porte. Si l’énergie a diminué, la passion pour ce que je fais demeure bien allumée. Ma cohorte de cette année est fort différente de la précédente. Je carbure aux défis et elle m’en offre son lot. Rien n’est plus gratifiant que de les aborder avec enthousiasme et de réussir à les relever.

Les temps sont durs pour la profession que j’exerce, mais elle demeure la plus belle et la plus exaltante. Je l’aime et elle me le rend bien.

Et ce n’est pas du charre !


Dans le cours de français

Un char est une voiture tirée par des chevaux, ou un véhicule de guerre. Au Québec, dans un langage familier, un char est une automobile.

Le mot charre, de son côté, est un nom possédant les mêmes racines que le verbe charrier, qui signifie exagérer, bluffer ou raconter des histoires.

En résumé, arrêter son char c’est éteindre son véhicule, alors qu’arrêter son charre c’est arrêter de charrier ou de dire n’importe quoi. L’orthographe fait toute la différence.


Dans le cours d’univers social
Volets histoire et éducation à la citoyenneté

Comme plusieurs, j’écoutais les nouvelles, vendredi soir dernier, quand j’ai appris qu’un vétéran de la Seconde Guerre mondiale, aujourd’hui âgé de 98 ans, avait été ovationné à la Chambre des communes, en présence du président ukrainien Volodymyr Zelensky, pour avoir combattu les Russes aux côtés de l’Ukraine. Je ne suis pas un historien. Je suis un enseignant généraliste qui, entre autres choses, enseigne les bases de l’histoire à des élèves de 6e année. Ma réaction à cette nouvelle a été instantanée.

Si ce type a combattu les Russes durant la Seconde Guerre mondiale, c’est qu’il était dans l’autre camp. Lors des deux guerres mondiales, le Canada et la Russie, ou l’URSS, faisaient partie de la même alliance. Des élèves de 11 ans l’apprennent chaque année, ceci étant au programme de leurs cours d’univers social. Dommage qu’autant d’adultes, pour la plupart instruits, aient à ce point failli à leur devoir de mémoire. Le Canada se serait évité un embarras international.


Dans le cours de musique

C’est une poésie mélodieuse que je propose en #musiquebleue, cette semaine. Celle qui l’interprète l’a également composée et écrite, en collaboration avec Stéphanie, une des deux sœurs Boulay. Tirée de l’album Les loups dorment tranquille, la pièce s’intitule Comment on continue.

Quant à l’artiste, c’est sous le pseudonyme de Belle Grande Fille qu’elle se lance dans l’aventure musicale.

Belle Grande Fille – Comment on continue – Les loups dorment tranquille – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

En mai dernier, une nouvelle technologie combinant deux implants, un relié au cerveau et l’autre à la moelle épinière, avait permis à un patient paraplégique de marcher de nouveau, activant ses jambes avec sa seule pensée. La même technologie permettra maintenant peut-être à un homme tétraplégique de recouvrer l’usage de ses doigts, de ses mains et de ses bras.

Le système est actuellement à l’essai et les premiers résultats s’avèrent concluants. Selon les scientifiques impliqués dans le projet, la mobilité d’un bras se veut plus complexe que celle d’une jambe, bien que pour cette dernière un travail de réapprentissage de l’équilibre soit nécessaire pour reprendre la marche.

La technologie employée dans ces deux cas pourrait être commercialisée au cours des prochaines années.

Agence France-Presse. Après les jambes, des implants testés pour retrouver le contrôle des bras paralysés. radio-canada.ca. Le 28 septembre 2023.


Billet du 18 mars 2022 : De Popeye à Dirty Plotte

Il sera question de bandes dessinées au début et à la fin de ce billet hebdomadaire. Si la seconde est bien québécoise et plutôt contemporaine, la première est directement tirée du répertoire américain. Le personnage de Popeye, créé en 1929 par Elzie Crisler Segar, est inspiré par Frank Fiegel, un célibataire natif de Chester, Illinois, tout comme Segar.

Bagarreur et fumant la pipe de maïs, Fiegel amusait l’enfant qu’était Segar. C’est pourquoi il s’en est inspiré pour créer ce qui fut d’abord un personnage secondaire de sa bande dessinée The Thimble Theatre, avant de devenir la vedette de ses propres aventures. Généreux et reconnaissant, E.C. Segar a partagé avec Fiegel une partie de la fortune que lui ont rapportée la bande dessinée Popeye et ses produits dérivés.

Illustration réalisée à partir d’une photo floue de Frank Fiegel. (Source : Baskerville Productions)

Lire Sur les traces du vrai Popeye, magazine Sphères, 23 mars 2020.


L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) est en voie de rejeter la demande de recommandation du vaccin québécois Medicago, contre la COVID-19. C’est Guillaume Lemay-Thivierge qui sera déçu. Mais beaucoup d’autres à travers le monde aussi.

La raison ? Un des actionnaires de Medicago, dont les produits sont tous à base d’herbes, est le cigarettier Philip Morris. Depuis longtemps, l’OMS rejette toute collaboration et toute entente avec des acteurs de l’industrie du tabac. Les règles du jeu étaient claires et Medicago a décidé de s’essayer quand même.

J’ose croire qu’aucun des actionnaires de Johnson & Johnson, Pfizer ou Moderna n’œuvre dans une industrie dont les produits s’avèrent néfastes pour la santé des humains. Sinon, ce serait un tantinet hypocrite.


Dans le cours de français

Un Chromebook est un ordinateur portable fonctionnant sans système d’exploitation. Il constitue un terminal internet offrant plusieurs possibilités à partir d’applications, plutôt que de logiciels.

Dans l’exercice de mes fonctions, je dois régulièrement écrire Chromebook au pluriel. Comme il s’agit d’un nom propre, j’avais d’abord tendance à lui garder son C majuscule et à le laisser invariable, mais quelque chose me dérangeait chaque fois. D’autres marques, comme Frigidaire et Mobylette, sont devenues tellement courantes dans l’usage qu’on en a fait des noms communs. On peut ainsi oublier la majuscule et les accorder en nombre.

Du côté de mes collègues, qui attachent la même importance que moi à la qualité de la langue française, les avis sont partagés. Certains accordent, d’autres non. Je me suis donc décidé à demander l’avis de l’Office québécois de la langue française (OQLF). Voici un extrait de la réponse que j’ai reçue :

Chromebook étant une marque de commerce, il faut considérer le mot comme un nom propre réservé dont l’usage est destiné à une utilisation précise dans un contexte commercial. Ces noms s’écrivent en romain et prennent généralement une majuscule initiale marquant leur caractère propre. Puisqu’il s’agit d’un nom propre, Chromebook ne prendra pas la marque du pluriel. En contexte, nous vous suggérons d’écrire, par exemple : «n’oubliez pas de vous présenter en classe demain avec vos Chromebook» ou «je vous invite à ouvrir vos portables Chromebook».

OQLF, le 16 mars 2022.

C’est maintenant clair, on n’accorde pas !


Dans le cours d’économie

Il n’y a pas de cours d’économie à l’école primaire, mais bon.

Voulez-vous un bel exemple d’investissement à long terme qui, 15 ans plus tard, rapporte encore d’importants dividendes ?

En février 2007, le Canadien de Montréal échangeait son défenseur Craig Rivet aux Sharks de San Jose, en retour de Josh Gorges et d’un choix de première ronde au repêchage. Ce choix allait permettre au tricolore de mettre la main sur son futur capitaine, Max Pacioretty.

Onze ans plus tard, en 2018, Pacioretty a pris le chemin de Las Vegas, moyennant Tomas Tatar, qui a rendu de fiers services au CH, et Nick Suzuki. Ce dernier représente le futur de l’équipe, celui qui en sera la grande vedette, probablement le capitaine. Il est sous contrat jusqu’en 2030 avec le Canadien. S’il se rend jusqu’à terme, l’échange de Craig Rivet, réalisé par Bob Gainey, aura échelonné ses retombées sur 23 ans. Rien de moins.


Dans le cours d’univers social, section histoire

En 1991, l’Ukraine a voté à 90 % son retrait de l’URSS. D’aucuns prétendent que Vladimir Poutine est actuellement en train de lui faire payer l’éclatement de l’URSS.

Pourtant, le grand responsable de l’éclatement de l’URSS est Mikhaïl Gorbachev, aujourd’hui âgé de 91 ans. À voir le président russe bombarder sans scrupule les civils ukrainiens, incluant de nombreux enfants, je me demande ce qu’il pense de la situation.


Dans le cours d’art dramatique

Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, s’est adressé au Parlement canadien et au Congrès américain, cette semaine.

Aux Canadiens, il a dit et répété : «Imaginez si…».

Aux Américains, il a montré des images.

Dans les deux cas, il a touché les cœurs. Il a démontré à quel point il est un excellent communicateur.


Dans le cours de musique

J’ai appris que le groupe montréalais Men Without Hats avait lancé un nouvel album, le 11 mars. Celui-ci a pour titre Again, part 2. Le nom m’a ainsi incité à fouiller sa discographie afin de dénicher le « part 1 » qui m’avait complètement échappé. Ce dernier est en fait un EP paru en 2021, alors que la sortie de la semaine dernière constitue la première compilation de nouveautés en plus de dix ans pour le groupe.

À travers la pièce If the World Should End Today, que je vous suggère en #musiquebleue dans ce billet hebdomadaire, le son new wave que Men Without Hats nous avait offert dans ses succès des années 1980 nous revient immédiatement en tête. C’est un retour dans le passé, celui de mon adolescence, avec du matériel entièrement nouveau.

Men Without Hats – If the World Should End Today – Again, part 2 – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

On appelle fanzine une publication créée par des passionnés, pour des passionnés. Parmi les plus populaires, il y a les bandes dessinées. Et dans le lot, se trouve la série Dirty Plotte, de l’auteure québécoise Julie Doucet, publiée entre 1991 et 1998 par Drawn & Quarterly. C’est pour l’ensemble de cette œuvre que madame Doucet, le 16 mars, a remporté le Grand Prix du Festival de la BD d’Angoulême, en France.

Ce festival est à la bande dessinée ce que le prix Goncourt est au reste de la littérature. Établi depuis 1974, c’est la première fois qu’il remet sa plus haute distinction à une personne originaire du Québec, et la troisième fois qu’il sacre une femme. Michel Rabagliati a déjà été récompensé deux fois lors de cet événement annuel, mais dans d’autres catégories que le Grand Prix.

En entrevue à France Culture, Julie Doucet a dû expliquer au journaliste Tewfik Hakem la signification du nom de sa série. Ceci a donné lieu à un moment de radio des plus amusants !

Lire le reportage et entendre l’entrevue de Julie Doucet sur France Culture.