Billet du 21 novembre 2025 : La liberté comme trajectoire

Il y a des figures qui nous rappellent qu’on peut avancer autrement, loin des sentiers balisés et des promesses faciles. Sabrina Gonzalez Pasterski fait partie de celles-là. Née en 1993 à Chicago de parents cubano-américains, elle n’a que seize ans lorsqu’elle pilote l’avion qu’elle a elle-même assemblé, pièce par pièce, dans le garage familial. À un âge où la plupart cherchent encore leur place, elle trace déjà la sienne. Elle poursuit ensuite ses études au MIT, une université reconnue mondialement pour l’excellence de ses programmes en sciences et en ingénierie. Elle y impressionne autant par sa rigueur que par sa curiosité insatiable. Pendant que les grandes entreprises technologiques multiplient les invitations pour attirer les jeunes talents, elle choisit plutôt la lenteur réflexive de la recherche fondamentale. Dans une époque qui confond trop souvent vitesse et réussite, elle rappelle que comprendre exige du temps.

Ce qui me touche chez elle ne tient pas seulement à sa précocité ou à son intelligence rare. C’est sa façon de résister calmement aux attentes et aux pressions du monde extérieur. D’après un reportage du Time Magazine publié en 2018, Jeff Bezos lui aurait offert une possibilité de carrière au sein de Blue Origin. Et selon les informations rapportées par Wikipédia, la NASA lui aurait manifesté un intérêt similaire. Beaucoup, à sa place, auraient accepté ces propositions prestigieuses. Elle, non. À seulement trente-deux ans, elle continue de privilégier sa liberté intellectuelle et de consacrer son énergie à des questions aussi complexes que la gravité quantique. Ce choix m’inspire profondément. Il me rappelle ces élèves qui, malgré la pression de performer, conservent leur curiosité intacte. Il me fait aussi penser à ces enseignants qui s’efforcent de créer des environnements où les jeunes peuvent réfléchir autrement et plus profondément.

C’est précisément là que mon travail sur la motivation naturelle trouve un écho. L’autonomie, la compétence et le sentiment d’appartenance, trois notions qui orientent ma réflexion depuis des années, guident également mon parcours de maîtrise. Ces idées se révèlent dans des trajectoires comme celle de Sabrina Pasterski. Elle progresse parce qu’elle choisit son chemin, parce qu’elle se sait capable, et parce qu’elle évolue dans un milieu qui encourage sa curiosité au lieu de la restreindre. Au fond, elle nous rappelle que la motivation ne s’impose pas. Elle se nourrit et s’entretient. Et on grandit réellement lorsqu’on demeure fidèle à ce qui nous anime, malgré tout ce qui nous entoure.


Dans mes écouteurs

Le quatuor a cappella QW4RTZ, reconnu pour ses harmonies impeccables, son humour et ses performances inventives, revient avec Trip de trad, un album qui revisite le répertoire traditionnel québécois avec fraîcheur et audace. En dix titres dynamiques, le groupe dépoussière des classiques comme Dondaine la Ridaine et J’entends le moulin, réinventant le folklore à quatre voix sans jamais trahir son essence. Il en résulte un projet court, vibrant et profondément ancré dans notre patrimoine musical.

En souvenir de La Bonne Chanson et de mes années d’études primaires, voici J’entends le moulin.

QW4RTZ – J’entends le moulin – Trip de trad – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

Un vent de fierté souffle sur la Montérégie. Grâce à l’organisme d’économie sociale Alternative Aliment-Terre, plus d’une tonne de citrouilles ont été sauvées du gaspillage et redirigées vers la chaîne alimentaire. Dans toute la région du Richelieu, des citoyennes et citoyens ont déposé leurs cucurbitacées d’après-Halloween dans des points de collecte, ce qui a permis à l’équipe, menée avec énergie par Emmanuelle Aubry et Sylvie Leclair, de leur offrir une véritable deuxième vie. Certaines seront transformées en cubes congelés, d’autres deviendront purée, tartes ou encore sauces surprenantes. Résultat : moins de gaspillage, plus de nourriture locale et un bel élan collectif pour l’environnement.

Encore plus réjouissant, la participation ne cesse de croître. En trois ans, le projet est passé de six à quatorze municipalités, et les quantités récoltées ont presque triplé. Ce mouvement citoyen montre qu’avec un peu d’organisation, beaucoup de cœur et un camion bien rempli, il est possible de transformer un geste simple comme recycler une citrouille en un impact réel pour la communauté. C’est une belle preuve que l’économie circulaire peut être savoureuse et profondément inspirante.


Billet du 29 août 2025 : Quand l’équité reste sur le bord de la route

Des chercheurs australiens de passage au Canada sont repartis avec une conviction claire : le système d’éducation ontarien les inspire, mais le Québec leur apparaît comme un exemple à ne pas suivre.1 Leur critique cible notre structure scolaire à trois vitesses — public régulier, public sélectif et privé subventionné — qui concentre les élèves vulnérables dans certaines écoles.

Ce miroir tendu par l’étranger dérange, parce qu’il reflète ce que beaucoup d’enseignants et de directions savent déjà. Plus la sélection s’installe, plus les classes ordinaires se retrouvent avec une concentration d’élèves en difficulté. Sur papier, on vante la liberté de choix. En pratique, on crée des inégalités qui minent l’équité scolaire. Et quand l’État continue de subventionner le secteur privé, à hauteur de 60 % du montant versé pour un élève dans le réseau public, il contribue directement à accentuer cette ségrégation.

Il suffit d’entrer dans une salle de classe pour comprendre l’impact concret de ce système. Dans un même groupe, certains élèves dévorent déjà des romans tandis que d’autres peinent encore à lire une phrase simple. D’un côté, des jeunes qui réussissent haut la main, de l’autre, des élèves qui cumulent difficultés d’apprentissage et défis liés au milieu de vie. Pour l’enseignant, cela signifie une gestion quotidienne d’écarts immenses. On appelle ça la différenciation pédagogique. Mais il faut être lucide : plus on concentre les vulnérabilités dans certaines écoles, plus la tâche des enseignants devient colossale. L’équité, dans ces conditions, n’est pas seulement un principe difficile à atteindre ; elle devient un combat quotidien.

Heureusement, dans nos écoles, il existe une formidable inventivité. Enseignement explicite, pédagogies actives, travail collaboratif avec les TES et les orthopédagogues : autant de moyens pour tenter de rétablir un certain équilibre. J’ai vu des enseignants bâtir des projets qui embarquent toute une classe, du plus fort au plus fragile. J’ai vu des équipes-écoles développer une véritable culture de solidarité. Ces efforts sont réels, mais ils reposent sur les épaules de celles et ceux qui, chaque matin, se retrouvent devant leurs élèves. Ils permettent d’atténuer les effets d’un système inéquitable, sans pour autant en corriger les causes.

Le rapport australien n’apporte peut-être rien de nouveau pour ceux qui vivent déjà ces réalités, mais il nous force à nous regarder autrement. Et la question demeure : si l’on juge de la qualité d’un système scolaire à la manière dont il traite ses élèves les plus vulnérables, quel reflet voulons-nous que le Québec projette ?

Parce qu’au fond, la vraie question n’est pas de savoir si notre système est à deux, trois ou quatre vitesses. La vraie question est de savoir si tous nos jeunes montent dans le même autobus, ou si certains sont condamnés à marcher, voire à rester sur le bord de la route. Et pendant que l’on finance à même les fonds publics des écoles qui sélectionnent leurs élèves, il faut avoir l’honnêteté d’admettre que ce choix collectif trace lui-même les lignes de l’injustice.

1 Plante, C. (2025, 23 août). Système d’éducation : Le Québec, l’exemple à ne pas suivre, selon un groupe d’experts australiens. La Presse.


On garde le rythme !

Mes billets hebdomadaires ont commencé tout juste avant le confinement, en février 2020. J’ai maintenu le rythme d’une publication chaque vendredi durant les trois premières années, avant de prendre l’habitude de ralentir durant mes vacances estivales et de publier une semaine sur deux en juillet et août.

Cet automne, je maintiendrai le rythme quinzomadaire repris cet été. Il en sera ainsi au moins jusqu’en janvier 2026. C’est que je poursuis et entreprends à la fois d’autres projets professionnels qui, combinés à mon travail de conseiller pédagogique, me laisseront très peu de temps pour la tenue d’un blogue hebdomadaire.

Écrire demeure pour moi un espace de liberté et de respiration. Même si le rythme ralentit, je continuerai à y revenir avec plaisir, comme on retrouve un ami cher, pour partager mes réflexions et mes découvertes.


Dans mes écouteurs

Annie Bélanger, auteure-compositrice-interprète québécoise, propose avec Tombée des nues un univers mêlant folk et pop moderne. Ses textes introspectifs, empreints de vulnérabilité et de résilience, s’appuient sur des arrangements acoustiques et des mélodies enveloppantes qui mettent en valeur une voix sensible et sincère.

Voici la pièce Diamant brut.

Annie Bélanger – Diamant brut – Tombée des nues – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

À seulement 13 ans, la jeune Écossaise Rebecca Young vient d’entrer dans le prestigieux top 10 du magazine Time grâce à une invention aussi ingénieuse qu’altruiste : un sac à dos solaire capable d’alimenter une couverture chauffante pour les personnes sans-abri. Né d’un simple projet scolaire, son concept a séduit bien au-delà de sa classe : il a déjà remporté un prix national d’ingénierie et permis la distribution de dizaines de prototypes à Glasgow. Son idée, née de l’envie de protéger les plus vulnérables du froid glacial, démontre que même la créativité d’une adolescente peut se transformer en solution concrète et salvatrice.

Au-delà de la prouesse technique, ce qui frappe, c’est le message d’espoir que Rebecca envoie : il n’y a pas d’âge pour agir et changer le monde. Soutenue par l’entreprise Thales, elle voit aujourd’hui son invention se multiplier, avec 120 nouveaux modèles en fabrication. En intégrant la première liste des Girls of the Year aux côtés d’artistes et d’athlètes internationales, elle incarne une génération qui ose allier innovation et solidarité. Voilà une nouvelle inspirante qui nous rappelle que l’avenir s’éclaire non seulement grâce à la technologie, mais aussi grâce à l’immense générosité des jeunes.


Billet du 30 août 2024 : Une ombre grandissante

La pénurie d’enseignants légalement qualifiés au Québec continue de s’aggraver à la rentrée 2024-2025. Selon les données les plus récentes, plus de 2707 postes d’enseignants restent à pourvoir. Cette situation signifie que de nombreux élèves n’auront pas accès à un enseignant qualifié, ce qui affectera assurément la qualité de l’enseignement et l’apprentissage des élèves.

En comparaison, à la rentrée 2023-2024, le nombre d’enseignants non légalement qualifiés était déjà en hausse. En février 2024, on comptait 7949 enseignants non qualifiés, une augmentation significative par rapport aux années précédentes. Ajoutons que parmi les nouveaux enseignants dits qualifiés, plusieurs ne disposent que d’une autorisation temporaire d’enseigner, sans brevet.

Les chiffres de la rentrée 2024-2025 mettent en évidence une crise qui ne cesse de s’intensifier. Les prévisions pour les prochaines années ne sont guère optimistes, avec une augmentation prévue de 1400 enseignants non qualifiés additionnels chaque année, de même que d’un nombre encore plus considérable d’enseignants dits qualifiés, mais sans brevet.


Dans le cours de français

Il est important de bien ponctuer ses phrases. L’absence ou la présence d’une simple virgule peut en changer tout le sens. Prenons la phrase suivante :

Il est important de bien ponctuer ses phrases. L’absence ou la présence d’une simple virgule peut en changer tout le sens. Prenons la phrase suivante :

« Ce que j’aime le plus, c’est manger, mes enfants et mes chats, pas nécessairement dans cet ordre ! »

En omettant les virgules, on obtient :

« Ce que j’aime le plus c’est manger mes enfants et mes chats pas nécessairement dans cet ordre ! »

Le sens diffère légèrement !


Dans le cours d’univers social
Volet histoire

Il m’est difficile de passer sous silence le décès de l’historien Marcel Tessier. Il fait partie de ces rares pédagogues qui ont su démocratiser à grande échelle la matière qu’ils enseignent. Natif de Montréal, il s’était retiré dans le patelin où j’enseignais entre le milieu des années 1990 et le milieu des années 2000.

Il était venu sans hésiter pour offrir bénévolement un cours d’histoire à mes élèves, en racontant avec enthousiasme et son style inimitable l’insurrection des Patriotes, qui faisait partie du programme de cinquième année du primaire, niveau que je leur enseignais.

À une autre occasion, j’expliquais à ma classe que malgré une longue recherche, je n’avais pas réussi à trouver le prénom du sieur de Laviolette, le fondateur de Trois-Rivières. Un de mes élèves d’alors, après l’école, avait pris l’initiative d’aller frapper à la porte de la résidence de monsieur Tessier pour lui poser la question. Il avait accueilli mon élève à bras ouverts et lui avait indiqué, documentation à l’appui, qu’aucun écrit officiel n’évoquait avec certitude le prénom de Laviolette.

Indépendantiste notoire, je l’avais contacté quelques années plus tard pour lui demander s’il acceptait d’appuyer publiquement un de mes amis, candidat à la mairie de l’endroit. Sa réponse avait été sans équivoque : « Je le ferai avec plaisir s’il s’affiche comme souverainiste ! »

Il demeurait malgré tout respectueux des personnages et des événements qui allaient à l’encontre de ses convictions, évoquant les faits historiques avec une grande rigueur.

Monsieur Tessier, bravo et merci.


Dans le cours de musique

Après Au cœur du rythme et Ça déménage, cet album s’appelle Le journal de Kalimba. La Deux-Montagnaise Carolyne Mailhot reprend son rôle de Kalimba et chante pour les enfants d’âge primaire. Voici la pièce TDAH.

Kalimba – TDAH – Le journal de Kalimba – #musiquebleue

La bonne nouvelle de cette semaine

Heman Bekele, un adolescent de 15 ans, a reçu le titre d’Enfant de l’année 2024 par le magazine Time pour son invention révolutionnaire : un savon capable de combattre le cancer de la peau. Inspiré par le désir d’aider ceux qui souffrent de cette maladie, Heman a mis au point un savon contenant des composés qui pourraient inhiber la croissance des cellules cancéreuses. Son innovation, encore en phase de développement, a déjà suscité l’intérêt de la communauté scientifique et pourrait, à terme, offrir une solution accessible pour réduire l’incidence de ce cancer à travers le monde.

En plus de son esprit d’innovation, Heman se distingue par son engagement envers les autres. Il espère que son invention contribuera à améliorer la vie de millions de personnes, en particulier dans les régions où l’accès aux soins de santé est limité. Ce jeune prodige incarne l’espoir et le potentiel des nouvelles générations à apporter des solutions aux défis mondiaux.