Les écoles publiques continuent à se vider de leur personnel. En janvier dernier, l’une de mes collègues, l’une des meilleures enseignantes avec lesquelles j’aie eu le plaisir de travailler, est partie enseigner dans une école privée. Je l’ai revue samedi et, moins de deux mois après ce changement professionnel, elle recommence à s’épanouir dans son travail.
Ça m’a fait du bien de la sentir aussi soulagée. La lassitude dont elle se disait accablée depuis les derniers temps a fait place à un enthousiasme évident, malgré le stress d’une adaptation qui se poursuit. Son quotidien a changé. Elle est maintenant entourée de ressources humaines suffisantes pour faire face à toutes les situations. Elle dispose des ressources matérielles nécessaires à son enseignement, alors que les ressources informatiques qu’on lui alloue sont de qualité largement supérieure à celles du réseau public. Le tout dans un environnement agréable et des plus fonctionnels.
J’enseigne à l’école publique, bien que je sois un produit de l’école privée. J’ai trempé dans les deux mondes et je constate que le fossé qui les sépare, déjà large il y a 40 ans, est encore plus profond aujourd’hui. Si la qualité des enseignants est la même aux deux endroits, les outils et les équipes de travail des personnes qui prodiguent le savoir diffèrent à un haut degré.
Le problème est que l’école privée reçoit des subventions gouvernementales qui peuvent avoisiner les 70 % de leurs revenus, alors que le réseau des écoles publiques tombe en ruines, au sens propre comme au sens figuré. Le Québec est, de loin, la province canadienne la plus généreuse envers ses écoles privées. En guise de comparaison, l’Ontario ne donne aucun argent public aux siennes.
La situation actuelle est inacceptable et il faut y remédier. Charité bien ordonnée commence par soi-même. Quand ton propre réseau d’éducation se meurt, tu dois y consacrer tout ton budget. Tout couper à l’école privée du jour au lendemain risquerait toutefois de causer une commotion dont les conséquences s’avéreraient pires que la situation actuelle. Il faut prendre le virage en douceur et y aller graduellement. Transférer annuellement 5 % à 10 % du budget d’un réseau à l’autre jusqu’à l’atteinte de l’objectif ? J’achète !
Il s’agit de la survie même de notre réseau d’éducation.
Dans le cours de sciences et technologie
C’était il y a 12 ans. Une sortie scolaire au Planétarium de Montréal m’avait permis d’apprendre qu’une éclipse solaire totale aurait lieu le 8 avril 2024. J’avais sur-le-champ sorti mon téléphone cellulaire et inscrit la date à mon agenda, me promettant de vivre l’expérience avec mes futurs élèves.
Au retour de la grève, il y a quelques semaines, j’ai annoncé à mes élèves mon intention de vivre ce moment en direct, en classe, avec eux. J’ai d’ailleurs inclus dans ma planification une étude du phénomène. Première tuile, mon centre de services scolaire, comme plusieurs autres, nous impose de rester à la maison pour des raisons de sécurité, le 8 avril prochain.
Qu’à cela ne tienne, j’ai encore l’option de l’enseignement à distance. Depuis la pandémie, j’invite toujours mes élèves à se brancher, à l’occasion. J’organise donc ma quincaillerie en conséquence. Autre tuile, une amie bien au fait du dossier m’implore de ne pas le faire. Elle m’indique que si un élève regarde l’éclipse sans prendre les bonnes précautions pendant mon cours à distance, je peux être tenu responsable des séquelles.
Ça devient complexe de vivre un moment historique en classe.
Je vais donc penser à autre chose. Après tout, je n’en suis pas à une innovation près. Même si ce n’est pas dans notre nature d’être créatif, on le devient quand on est enseignant.
Dans le cours de français
Pour les besoins de l’anecdote, je rappelle que j’enseigne à des élèves de 11 et 12 ans. Si la plupart d’entre eux savent bien chercher un mot dans le dictionnaire, il en est autrement de l’utilisation du Bescherelle. Les outils numériques, efficaces et accessibles, permettent une recherche précise, rapide et beaucoup plus intéressante pour des jeunes. Cette année, je me suis fait plus insistant en enseignant les rudiments de l’utilisation de cette classique référence imprimée.
Lors d’une période d’écriture, au cours de la semaine, une élève se promenait dans la classe avec son Bescherelle ouvert et montrait quelque chose à ses pairs, qui ne manquaient pas de sourire ou de s’esclaffer. Curieux, et voulant éviter que la situation ne vire en foire, j’ai invité l’élève à venir partager le fruit de sa découverte avec moi.
Dans l’index des verbes, à la fin de l’ouvrage, elle a mis le doigt sur le verbe chier.
Que de souvenirs me sont remontés en mémoire ! Le nombre de fois où, vers le même âge, mes amis et moi cherchions des mots du même acabit dans les ouvrages de référence et éclations d’un rire gras au simple constat de leur présence dans leurs pages.
Si Internet est une mine d’or, les livres, depuis une génération, prennent des allures de trésors cachés. Les sortir de terre enrichissent l’esprit. Heureux de voir mes élèves commencer à le constater.
Dans le cours de musique
J’ai eu droit à une belle surprise, cette semaine, avec la sortie du septième album de Christine Tassan et les imposteures. Jamais il ne se sera écoulé autant de temps, six ans, entre deux parutions du sextuor de jazz manouche. L’attente en a toutefois valu la peine. Quinze fois plutôt qu’une, un pur plaisir se dégage de l’écoute. Sur la route, le premier des quinze titres, est également celui de l’album. Le voici, en #musiquebleue.
La bonne nouvelle de cette semaine
Décédé il y a 18 mois à l’âge vénérable de 96 ans, David Gottesman était un protégé de Warren Buffett. En 1964, il a fondé la firme d’investissements First Manhattan, grâce à laquelle il a fait fortune. Sa veuve, Ruth Levy Gottesman, a ainsi hérité d’une somme colossale.
Cette semaine, madame Levy Gottesman a remis 1 milliard $ au Albert Einstein College of Medicine, situé à New York, à la seule condition que cette somme serve à couvrir l’ensemble les droits de scolarité de tous les étudiants en médecine, actuels et à venir, de l’institution.
Aux États-Unis, les étudiants en médecine terminent leurs études avec une dette moyenne de 200 000 $. Chaque année d’étude leur coûte environ 63 000 $.
